Lettre ouverte au directeur général de l’INSEE

jeudi 7 juillet 2005, par Le collectif
Communiqué du collectif
Objet : Projet INES-Extension du contenu et des finalités du RNIPP

LDH (Ligue des droits de l’homme)
SM (Syndicat de la magistrature)
SAF (Syndicat des avocats de France)
IRIS (Imaginons un réseau internet solidaire)
DELIS (intercollectif Droits et libertés face à l’informatisation de la société)
Monsieur le directeur général
Institut national de la statistique et des études économiques
18, Boulevard Adolphe Pinard
75675 - Paris cedex 14

Le 7 juillet 2005

Objet : Projet INES-Extension du contenu et des finalités du RNIPP

Monsieur le directeur général,

À l’issue d’une réunion le 19 avril dernier avec Monsieur le secrétaire
général du ministère de l’intérieur, vous avez donné, au nom de
l’institut national de la statistique et des études économiques, votre
accord au principe d’une extension du contenu et des finalités du
répertoire national d’identification des personnes physiques. Le
répertoire se verrait enrichir des éléments de filiation de chaque
personne, et servirait à certifier les éléments d’état civil fournis par
les demandeurs de titres d’identité, dans le cadre de la mise en place
d’une future carte nationale d’identité électronique.

Les organisations signataires de la présente demandent le retrait du
projet INES. Ils partagent en effet l’analyse que ce projet recèle
plusieurs dangers, au nombre desquels celui de voir se constituer un
fichier de police à l’échelle de la population. La finalité
essentiellement policière de ce fichier ne fait aucun doute. Le projet
vise à rendre la détention d’une carte d’identité obligatoire et à
rendre plus effectif le contrôle des identités de chaque citoyen par
l’Etat et plus spécialement par les services de police. Pour ce faire,
il est même envisagé de compléter le fichage des éléments déclaratifs
d’état civil par la constitution d’une base de données d’empreintes
digitales.

La mission de l’INSEE est de collecter et produire avec indépendance
des informations et des études sur la société et l’économie. Accepter
qu’elle participe à cette nouvelle mission d’auxiliaire du ministère de
l’intérieur par l’extension des finalités du RNIPP contribuerait à
fausser ce rôle et son image.

Autant la communication directe des actes d’état civil paraîtrait de
nature à permettre la détection d’éventuelles usurpations d’identité,
autant un dispositif de certification systématique par le RNIPP
révèlerait surtout les nombreuses erreurs de saisie figurant dans les
différents fichiers et répertoires des administrations. Le ministère de
l’Intérieur estime que de telles erreurs pourraient concerner 25% de la
population.

Ces erreurs ne produisent actuellement que des conséquences bénignes à
leur apparition, conduisant dans le pire des cas à des retards de
versement de prestations. Le schéma proposé d’articulation du projet
INES avec la consultation du RNIPP entraînerait la suspicion
systématique des personnes concernées par de simples erreurs ayant
entaché l’enregistrement de leur date de naissance ou de l’orthographe
de leurs nom et prénoms. Un quart de la population se trouverait ainsi
exposé à d’inévitables complications administratives parfois
traumatisantes, coûteuses de surcroît pour l’administration, sans gain
avéré en terme de prévention de la fraude.

Dans ces conditions, nous pensons que l’INSEE ne doit pas sortir de son
rôle pour se faire l’auxiliaire du ministère de l’intérieur dans le
cadre de ce projet et risquer de perdre la confiance des usagers
nécessaire à l’exercice e ses missions.

Nous vous demandons par conséquent de retirer l’accord de principe donné
au nom de votre institut.

Pour le collectif :
Côme Jacqmin

Secrétaire général du Syndicat de la magistrature